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Les tribulations d'un sombre héros.
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Les tribulations d'un sombre héros.
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4 septembre 2009

A l'aube du quatrième jour...

 

Au crépuscule du troisième jour, le sombre héros contempla ce qu'il avait fait... et se dit qu'il y avait encore du boulot.

Alors il décida de s'asseoir à la table de la cellule qu'on lui avait allouée pour quelques jours et de faire le point...

Le premier jour. Je me réveille à 10 heures et demi, décalé, assoiffé, affamé. J'ai encore quelques heures devant moi avant d'aller traîner ma mine de déterré à l'Alliance où je dois rencontrer mes collègues. Je prends une douche et me débarrasse enfin de cette persistante odeur de voyageur (doux euphémisme), échange quelques civilités incomprises avec les globuleuses dames de l'accueil et part à l'assaut de Querétaro. Il fait chaud. Mes pas embrumés me portent naturellement vers le centre historique de la ville. Je marche, je marche... des palmiers, du bruit, des rues un peu décrépites qui me rappellent immanquablement la Chine. Mon cerveau et ses deux neurones ne notent rien d'étrange, trop absorbés par l'effort que représente cette première balade. Et puis tout à coup, je m'arrête sur une place envahie de verdure. El Jardin Zenea. Je regarde autour de moi et là, je comprends.

001C'est quoi cette église hispanique, en face ? Et pourquoi toutes les maisons sont peintes en rouge, en jaune, en bleu intenses ? Putain. Je suis au Mexique. Putain. Tu l'as fait, mon vieux. Je reprends ma marche alors que mes sens se réveillent. Les odeurs, la lumière, les couleurs, les visages. J'absorbe tout. Les gens qui me croisent doivent se demander ce que c'est que ce sourire abruti que je trimballe.

005A chaque coin de rue, on trouve des vendeurs de drapeaux mexicains. Je ne tarde pas à comprendre que c'est bientôt la fiesta de la liberacion nationale. Marrant. Je cède ensuite aux avances d'une mamma mexicaine qui me vante sa carte et ses quesadillas et je m'abandonne aux délices de mon premier repas mexicain : de succulentes crêpes fourrées au poulet baignant dans une sauce rose (dont mon petit doigt me dit qu'elle est a base de haricots (fajolitas, je crois) ) .

L'après-midi, je prends mon courage à deux mains et je vais rencontrer ceux avec qui je vais bosser ces prochains mois. L'accueil est chaleureux et je tente de suivre, l'air concentré, la visite guidée des lieux par la coordinatrice pédagogique, très amicale. Je discute avec un vieux routard de Québécois qui a posé son sac ici il y a dix ans pour devenir le responsable de la bibliothèque. On me donne plein de conseils pour trouver un appart le plus vite possible. Soulagé par cette ambiance détendue, je décide que tout va bien, et que je mérite une deuxième incursion en ville, le soir.

***

Assis à la terrasse d'un petit bar, je me force à ne pas sursauter à chaque fois que le tonnerre déchire le ciel, mes tympans avec. « Ben oui, c'est la saison des pluies, m'a affirmé Angeme le québécois... Mais jusqu'ici, il n'a pas beaucoup plut. » Moui... mais c'était avant l'arrivée d'un Boulonnais dans la place. Tout autour de moi, la joyeuse rumeur des gens attablés me tient chaud. J'ai vraiment l'impression que le ciel va s'ouvrir en deux. Je tente de rassembler mes esprits pour chercher une chambre dans le journal de petites annonces que je viens d'acheter. Un sentiment de liberté absolue sourd en moi. Etrange. Excitant. Effrayant. J'ai les cartes en main, à moi de jouer. Alors que j'essaie de coucher par écrit ce que je ressens, je me rends bien compte que je fais tout pour ne pas me laisser submerger par la marée des émotions. Pourtant, elle me passe bel et bien dessus, m'emportant dans un sens puis dans l'autre...

Je réalise que la pluie ne cesse pas et je constate avec un brin de perplexité que l'eau commence à stagner dans les rues. Voire à monter. Ah oui, elle monte, tiens. Dans un éclair (c'est le cas de le dire) de lucidité, je décide de rentrer à l'hôtel vite fait mais on ne défie par impunément les éléments comme ça, mon petit monsieur ! Lorsque j'y parviens, j'ai de l'eau jusqu'aux mollets et je gravis les marches de mon quatre étoiles, un peu penaud, sous l'oeil flegmatiquement hilare des portiers.

***

Le deuxième jour est consacré presque exclusivement à la recherche d'une chambre. On n'imagine pas à quel point on a recourt aux gestes, quand on tente de balbutier ses premiers mots dans une langue inconnue. Le téléphone, lui, me le rappelle gentiment. De l'hôtel, je passe donc quelques coups de fil aux numéros que mes collègues m'ont généreusement communiqués et là, y a pas, j'ai beau essayer de mimer pour étayer mon « quiero un cuarto en vuestra habitacion », seules les globuleuses peuvent apprécier le spectacle . Bon, après quelques malentendus, j'arrive quand même à prendre rendez-vous pour visiter trois chambres. La première est située à une vingtaine de minutes à pied de l'Alliance, dans une charmante maison typique, avec cuisine aménagée, salle de bain avec baignoire, machine à la laver, le tout (oui enfin la maison) habité, entre autres, par les deux soeurs qui me font visiter (la plus vieille doit avoir mon âge). Tout a l'air sympa. La chambre est petite mais pas moche. Juste un petit problème... elle sert de couloir à un autre locataire qui doit y passer pour accéder à la sienne... Euh... bon, ben non alors.

Après une errance désoeuvrée à l'Alliance, je file à mon autre rendez-vous. Je n'ai que le nom de la rue.. c'est donc là que j'attends le bougre de proprio qui se fait désirer. Après 15 minutes, je décide de sonner aux portes pour chercher el señor Augustin. Personne ne connait. Ceci dit, j'ai l'impression qu'on me comprend ! Un adorable sexagénaire pousse même jusqu'à dire que je hablo español muy bien. Mouais... en même temps, c'était juste après avoir repéré mon accent français et m'avoir dit « de rien ». Le faquin aura voulu éviter de me vexer...

Bref, au bout d'une demi-heure, un type tout bizarre sort d'une des maisons comme un diable et me demande si je le cherche. « Ben oui, même que ça fait un bout de temps, coco », pensè-je en mon fors intérieur. Bizarre donc. Oui, je crois qu'on peut employer ce terme quand on a en face de soi une personne habillée comme Sid Vicious qui aurait été abusé par Jean-Paul Gautier et dont la moitié du visage coule inexorablement vers le sol. Oulah. N'osant pas même imaginer à quel genre de radiation le type a été exposé, je maintiens avec ladite coulure une distance respectable. Augustin fait d'ailleurs tout pour me mettre à l'aise et pose une main pudique pour soutenir sa joue récalcitrante. C'est bien aimable, mais ça n'empêche que son plan est foireux. La cuisine n'est pas équipée, les toilettes ne ferment pas et la douche est... dans le lavabo. Il ne peut pas me faire visiter la chambre, bien sûr, parce qu'il y a un cadenas et qu'il n'a pas la clé. Ah ben oui, bien sûr...

Or donc, sachant par avance que la troisième chambre tient plutôt de la cage à lapin, je maudis ces Dieux chagrins qui m'affublèrent d'un tel karma quand soudain le téléphone sonne à l'Alliance, où je suis revenu traîner mon désespoir. D'un coup de baguette magique, les deux soeurs ont fait apparaître dans leur charmante demeure une nouvelle chambre, plus chère, mais plus grande et surtout sans autoroute au milieu... Esta muy muy bien. Cette chambre, je l'ai visitée ce matin (mercredi) et je ne crois pas que j'aurais pu trouver mieux. J'y emménage samedi, en espérant ne pas y découvrir un vice caché.

C'est donc le coeur léger que je me rends, mardi soir, en compagnie de quelques collègues, chez Isela, la secrétaire de l'Alliance, pour un repas d'adieu en l'honneur d'une prof sur le départ, et aussi, un peu, de bienvenue pour moi. Et là, je découvre que je suis fan de la cuisine familiale mexicaine. Oh, ce qu'on mange n'est pas extrêmement sophistiqué: ce sont des épis de maïs (fraîchement coupés) cuits à la vapeur (pendant trois heures !) et que l'on tartine de crème fraîche, de fromage et bien sûr, de piments divers et variés (5 sortes sur la table). A ma grande honte, j'ai oublié le nom de ce plat... Je redemanderai demain.

On me fait boire moult téquilas et je finis par une « danse du pâté de tête » (comprenne qui pourra) qui accélère semble-t-il mon intégration parmi les mexicains. Je sais déjà alors que cette soirée restera gravée dans ma mémoire pour la vie. Tous ces gens sont vraiment charmants, et même si je suis frustré de ne pas pouvoir communiquer comme je le voudrais (on parle espagnol la plupart du temps), je ressens néanmoins une grande sympathie, au sens premier du terme.

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Commentaires
D
Aye, caramba ! En effet, "tu l'as fait !"... Passionnant de suivre ce parcours qui me fait un peu penser à un voyage initiatique... Tout est allé très vite, je verse donc une petite lagrima pour l'occasion...<br /> <br /> Au sujet de Sid Vicious, qui n'a rien, quant à lui, d'un vice caché, tous les Mexicains sont-ils aussi "coulants" ?... A l'égal des Chinois, ils semblent en effet, d'une manière générale, extrêmement affables et ouverts. En tous cas, content que tu aies trouvé une chambre sans servitude ou droit de passage d'un autre âge.
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